La porte du ciel
« Il eut un songe. Et voici, une échelle était appuyée sur la terre, et son sommet touchait au ciel. Et voici, les anges de Dieu montaient et descendaient par cette échelle. […] Il eut pu : et dit : Que ce lieu est redoutable ! C’est ici la maison de Dieu, c’est ici la porte des cieux ! » (Genèse 28.12, 17)
Je m’imagine l’impression que provoqua ce songe sur Jacob fuyant la maison paternelle, poursuivi par la colère de son frère Ésaü qu’il avait supplanté. Quand nous nous trouvons en situation d’insécurité, fuyant nos propres erreurs, la rigueur des circonstances adverses ou la colère de ceux qui nous veulent du mal, quand notre vie est coincée dans un tunnel obscur sans issue ; quand nous ignorons ce qui nous attend au bout du tumultueux voyage, que nous ne savons même pas quelle est la volonté de Dieu, alors avoir un tel rêve est une révélation de la Providence, ô combien rassurante ! C’est ce qui arriva à Jacob. Lui qui se sentait si malheureux, si abandonné, si profondément peiné d’avoir trompé son vieux père, il vit une échelle qui unissait le ciel où siège le Dieu saint, miséricordieux et tout-puissant, avec la misérable terre sur laquelle il gisait, harcelé par la peur, l’incertitude et la culpabilité.
Jacob appela ce lieu Bet-el, « maison de Dieu », et y ajouta un synonyme, « porte du ciel ». L’image d’une échelle qui monte de la terre au ciel pourrait correspondre à une figure contextuelle symbolisée par les ziggurats, ces tours pyramidales à gradins portant un sanctuaire à leur sommet. Selon Philon, un philosophe juif d’Alexandrie, l’échelle de Jacob est l’image de la providence que Dieu exerce sur la terre par le ministère des anges. Des auteurs chrétiens y ont aussi vu une préfiguration de l’incarnation de Jésus, tel un pont entre le ciel et la terre. Ces deux interprétations sont correctes.
Jacob comprit la grandeur de cette révélation et sacralisa l’endroit en y érigeant une pierre en guise de stèle, qu’il oignit d’huile pour matérialiser la réalité de la présence divine. Et, bien sûr, il eut peur, parce qu’en ce lieu devenu porte du ciel, il avait vu l’habitation céleste de Dieu se superposer à son habitation terrestre, Béthel.
Voilà comment se manifeste la magnifique, l’éminente, la grandiose providence divine, bien que nous ne nous en apercevions pas toujours. C’est la représentation de l’union du ciel et de la terre, c’est la gloire de Dieu et de ses anges à côté de nous, lorsque nous sommes apeurés, impuissants, suppliants.
C’est lui qui nous garantit son aide dans les tragédies de la vie quotidienne, pour nous rappeler qu’il y a un Dieu dans les cieux.
(« Mais il y a un Dieu dans les cieux » Carlos Puyol Buil. Ed: Safeliz)