Réveil et Reforme

Blog « Réveil et Réforme » de l'Église Adventiste du Septième Jour de l'île de La Réunion

La pensée cruciforme

4 novembre 2013

Quelles sont les motivations de nos relations avec autrui ? 

Imaginez la forme toute simple d’une croix. Le plan d’une cathédrale, une épée, la queue d’un avion, une molécule de laminine, des pierres tombales, des boucles d’oreille, des parachutes et même le drapeau Suisse ! Les objets en forme d’une croix sont dits « cruciformes ». Ce terme provient du latin crux qui signifie « croix », ajouté du suffixe « forme ».

Imaginez maintenant un esprit en forme de croix : un esprit cruciforme. Je ne parle évidemment pas d’un cerveau humain en forme de croix, mais d’une pensée qui est spirituellement et moralement modelée selon la signification de la croix : l’attitude de sacrifice et de don de soi qui a conduit Jésus-Christ à se dépouiller de lui-même pour les autres, à prendre la forme d’un serviteur, s’humiliant lui-même « jusqu’à la mort, la mort sur la croix » (Ph 2.8).

Une vie en forme de croix

Imaginez-vous vivre une vie en forme de croix où nous choisirions le chemin de l’amour, de la réconciliation et de la paix et où nous nous consacrerions au bien d’autrui de manière désintéressée. Imaginez la « cruciformité » avec les autres : partager le même esprit, s’aimer les uns les autres, collaborer unis par le même objectif, dans l’humilité et la soumission mutuelle, en pensant d’abord et plus aux autres qu’à soi. Comme si nous avions Jésus en nous !

« Ayez en vous la pensée qui était en Christ-Jésus » (verset 5).

Nous sommes dans la crainte face à l’esprit cruciforme du Christ et à l’invitation à suivre son exemple. Son esprit cruciforme est le premier effet important du véritable renouveau dans le cœur d’une personne. Un changement radical dans la relation personnelle avec Christ entraîne immanquablement un changement dans le rapport avec autrui. L’esprit du Christ dirige désormais nos pensées, nos réactions et actions envers les autres. La « cruciformité » est un travail invisible profond dans les coulisses de toutes nos interactions visibles avec autrui.

Une mentalité d’égoïsme et de rivalité se faufile toujours dans notre vie quotidienne. La compétition, l’envie, le désaccord, l’isolement, l’hostilité et les violences de toutes sortes composent la réalité humaine. Le conflit, quel qu’il soit, caractérise notre vie : dans le couple, au travail, à l’église, dans la famille, dans le monde en général. Nous sommes dressés les uns contre les autres et contre Dieu, vivant le grand conflit sur le paysage de notre cœur. C’est notre façon de penser – une mentalité d’auto-gratification et de compétition – qui nous pousse à suivre notre propre volonté et notre propre route. Nous sommes prêts à gagner, même au prix de la paix, de la coopération et de l’amour. La vie nous enseigne que ça arrive à tout le monde, n’importe où et n’importe quand. Les conflits d’opinion, de pouvoir et de contrôle et les divergences dans les objectifs sont inévitables. On n’en est préservé nulle part et personne n’est épargné.

Pourtant, la pensée cruciforme du Christ peut briser ce cercle vicieux dans notre vie.

L’esprit du Christ

Dans Philippiens 2, Paul décrit comme un « chef-d’œuvre » l’esprit de Jésus en relation avec Dieu et les êtres humains perdus : « Lui dont la condition était celle de Dieu, il n’a pas estimé comme une proie à arracher d’être égal avec Dieu, mais il s’est dépouillé lui-même, […] il s’est humilié lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort, la mort sur la croix » (versets 6-8).

Cet état d’esprit de la croix du Christ trouve son origine dans l’éternité passée : avant la création de notre monde, avant que l’esprit d’égoïsme, de rivalité et de conflit n’enveloppe notre monde. Avant la fondation du monde, il était déjà l’Agneau immolé (Ap 13.8). Dans sa vie et dans sa mort, Jésus a agis en conformité avec le caractère de son Père : « Celui qui m’a vu a vu le Père » (Jn 14.9), « si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père » (verset 7). L’acte du Fils sur la croix était de « ressemblance familière » à la conformité avec le Père. Dieu est semblable au Christ. La « cruciformité » est une qualité du caractère de Dieu. Le Père, le Fils et la croix sont liés. Une des façons dont Dieu se fait connaître est la croix du Christ.

Ce « chef-d’œuvre » se produit dans le contexte de rivalité parmi les chrétiens de Philippes. Leur attitude égoïste et intéressée s’opposait au sacrifice de soi et au don de soi du Christ. L’unité du corps était menacée. Seuls une attitude et des actes reflétant l’esprit du Christ pouvaient ramener la paix dans ces relations tendues. C’est pourquoi Paul lance son appel : « une même pensée ; ayez un même amour, une même âme, une seule pensée ; ne faites rien par rivalité ou par vaine gloire, mais dans l’humilité, estimez les autres supérieurs à vous-mêmes. Que chacun de vous, au lieu de considérer ses propres intérêts, considère aussi ceux des autres. Ayez en vous la pensée qui était en Christ-Jésus » (Ph 2.2-5).

Paul savait ce qu’il demandait. Sa rencontre avec Jésus Christ sur la route de Damas l’a pris par surprise. Ça a été une expérience de grâce extrême qui a produit sa conversion : un changement drastique et radical de direction au plus profond de son cœur. Auparavant obstiné, orgueilleux, égoïste, arrogant, agressif, intraitable, farouche, cruel, haineux, impitoyable, répressif et violent (1 Tm 1.13 ; cf. Ac 8.3 ; 22.4,5), il déchaînait dans la vie de gens innocent des tempêtes de destruction, de tristesse et de mort.

La puissance de la croix

Paul a alors rencontré Jésus qui ne s’est pas accroché à ses droits, mais s’est dépouillé, humilié, laissé crucifier pour lui, l’arrogant, l’obstiné, l’égoïste et violent persécuteur. Paul était bouleversé jusqu’au moindre recoin de son être par cette nouvelle vision de l’état d’esprit du Christ. Il désirait que sa

propre vie et son ministère soient cohérents avec « le récit de la croix » : « Nous portons toujours avec nous dans notre corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus se manifeste dans notre corps. Car nous qui vivons, nous sommes sans cesse livrés à la mort à cause de Jésus, afin que la vie de Jésus se manifeste aussi dans notre chair mortelle. Ainsi la mort agit en nous, mais la vie en vous » (2 Co 4.10-12). Paul représentera dans sa vie le récit de la croix.

Notre existence chrétienne est d’être transformé à l’image du Christ qui ne fait rien par rivalité, ou pour lui-même. La « cruciformité » est le modèle de la mort constante en Christ qui produit en nous une personne semblable à lui (cruciforme). Cela signifie appréhender le récit de la croix par le fait qu’elle ait transformé toute notre existence à son image : une vie caractérisée par le sacrifice, l’amour et dans laquelle sa puissance se manifeste dans notre faiblesse et où on choisit le chemin de la paix, de la réconciliation, de l’unité, de l’amour.

Ressembler à Jésus

Charles (c’est un pseudonyme) et son épouse étaient constamment en conflit. Il devenait de plus en plus haineux et blessant, face à ses paroles et son comportement. La colère et l’amertume remplissaient son cœur. L’amour avait disparu. Alors Dieu lui parla. Non pas de façon audible, mais au fond de lui : « Charles, si mon Fils avait épousé ta femme, rien de ce qu’elle ferait lui ferait moins l’aimer. Rien ne l’empêcherait de lui pardonner, de la servir et de la faire passer avant lui. Charles, si mon Fils avait épousé ta femme, rien de ce qu’elle ferait ne pourrait le rendre blessant, ou haineux dans ses réactions et son comportement. Absolument rien ! Si mon Fils mon Fils avait épousé ta femme, il serait prêt à donner sa vie pour elle, comme il l’a déjà fait au Calvaire. »

Imaginez les implications d’une mentalité cruciforme dans nos propres vies. Quelle différence ferait-elle dans nos relations ? Notre cœur est un important champ de bataille stratégique dans le grand conflit. Quelle voie choisirons-nous ? Laisserons-nous les voies du Christ diriger nos pensées, nos réactions et nos rapports avec autrui ? Mettrons-nous de côté toute rivalité ? Serons-nous réconciliés ? Désirons-nous mettre de côté notre intérêt, ou notre volonté pour le bien d’autrui, pour Jésus ?

Ce n’est pas grâce à nos propres efforts que nous pourrons obtenir un esprit cruciforme. Seul l’Esprit du Christ peut orienter notre cœur vers l’amour, la paix, la patience, la maîtrise de soi et l’altruisme (Ga 5.16-18, 22-24). Comme pour l’apôtre Paul, cette œuvre débute en nous quand nous sommes saisis par le récit de la croix et l’esprit cruciforme du Christ. Par la puissance du Saint Esprit, vivons une vie transformée par la croix.

Larry Lichtenwalter

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