Le cheval de Troie
« Car je prends plaisir à la loi de Dieu, selon l’homme intérieur; mais je vois dans mes membres une autre loi, qui lutte contre la loi de mon entendement, et qui me rend captif de la loi du péché, qui est dans mes membres. Misérable que je suis ! Qui me délivrera du corps de cette mort ?» Romains 7.22-24
Paul présente le chrétien déchiré, aliéné ; tel un être possédé qui n’est plus maître de son faire et de son agir. Si les normes, les règles établies par Dieu lui procurent de la joie, le croyant réalise cependant qu’une « autre loi » lutte contre « la loi de son esprit, de sa raison ». Semblable à la ville de Troie assiégée et envahie de l’intérieur par les Grecs, le croyant se sent assailli par une autre puissance. L’idée d’un envahissement malgré soi est rendue par un
lexique assez fort qui renvoie au champ lexical de la guerre : « faire une expédition militaire », « emmener en captivité » et « délivrer ».
Cette idée de lutte contre un ennemi intérieur, le péché, qui assiège le chrétien malgré lui, renvoie à une légende. Celle d’Homère, un poète du VIIIe siècle av-JC, qui fait dans l’Iliade le récit d’une expédition militaire particulière. Suite à l’enlèvement de la princesse Hélène par les Troyens, les Grecs assiègent la cité de Troie durant plusieurs années et imaginent finalement une stratégie pour prendre cette ville. Ils construisent un cheval géant en bois creux, dans lequel se cachent des soldats. Le cheval achevé est tiré dans l’enceinte de la cité. Les habitants l’accueillent et le célèbrent comme un don aux dieux. Puis, lorsque les Troyens se sont enivrés, les Grecs sortent du Cheval durant la nuit et ouvrent les portes de la cité, permettant au reste de l’armée d’entrer et de piller la ville. Dans ce récit, la ville est violée par ruse, c’est de l’intérieur que sort la force de frappe. L’assaut est mené et la ville détruite.
Dans le cas décrit par Paul, l’assaut du péché vient de l’intérieur, mais il est visible, d’où les propos de l’apôtre « je vois », « je discerne ». Les Troyens n’ont pas vu venir l’ennemi grec, tandis que le croyant connaît son ennemi. S’il est vrai que l’homme est victime d’une puissance qui se dresse contre lui et l’entraine à faire ce qu’il ne souhaite pas, à cause de sa nature déchue ; néanmoins, le croyant n’est pas abandonné dans cette lutte.
Seul, le chrétien est incapable de discernement ; mais avec l’aide du Christ, il devient plus fort. En effet, l’homme est vulnérable par sa solidarité au Péché d’Adam. Tant qu’il est vivant, il devra subir les assauts multiples du Péché, mais il possède la certitude que grâce à l’Esprit de vie en lui, il peut être victorieux. Toutefois, s’il pèche, il peut être pardonné et continuer son parcours. Jean rajoute en 1 Jean 2.1 : « Mes petits-enfants, je vous écris ces choses, afin que vous ne péchiez point. Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste ».
Evelyne HONORE