Aimez vos ennemis

« Vous avez appris qu’il a été dit : Tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Mais moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, bénissez ceux qui vous maudissent, faites du bien à ceux qui vous haïssent, et priez pour ceux qui vous maltraitent et qui vous persécutent. » (Matthieu 5.43-44)

Ces versets et ceux qui suivent forment l’une des parties les plus belles de l’Évangile. « Vous avez entendu qu’il a été dit » se réfère à Lévitique 19.18 : « Tu ne te vengeras point, et tu ne garderas point de rancune contre les enfants de ton peuple. Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Mais cet amour du prochain se limitait aux enfants d’Israël et aux étrangers résidant parmi eux (Dt 10.18-19). Ni la Thorah ni l’ensemble de l’Ancien Testament ne contiennent de précepte ou de recommandation qui parle d’aimer les ennemis ; rien non plus n’ordonne de les haïr ou de les détester.

Dans le sermon sur la montagne, Jésus condamne aussi le formalisme, l’aveugle adhésion des pharisiens à la lettre de la loi. Par le « vous avez appris qu’il a été dit aux anciens… mais moi je vous dis… » (Mt 5.21-22), Jésus remplace « l’appareil photographique de la morale pharisaïque » qui capte seulement l’extérieur, par « l’appareil aux rayons X de l’Esprit saint », qui voit, découvre et juge l’intérieur, le cœur.

À la loi du talion, « œil pour œil et dent pour dent » (Mt 5.38-42), qui fut donnée pour réglementer la vengeance et freiner le mal, Jésus oppose le principe actif de la non-violence qui consiste à ouvrir la conscience d’autrui, à y introduire un rayon de lumière, à ne pas réagir par la force mais par l’Esprit (lequel pénètre, reprend et convainc), à dans la pratique, présenter l’autre joue, à donner aussi son manteau si on vous a pris votre tunique, à porter une charge deux miles si on vous a obligé à en faire un.

Toujours dans le contexte de l’éthique des relations interpersonnelles, Jésus dépasse de loin les limites imposées par la morale rabbinique et monte au zénith même de la morale chrétienne en traitant de l’amour pour les ennemis (Mt 5.43-45) sans en appeler aux sentiments passagers mais en recourant aux saints principes qui émanent de l’amour divin en soi. Le Seigneur sait que nous ne pouvons être d’authentiques croyants en ayant le cœur plein de haine, même s’il existe des raisons qui la justifient. En priant pour ses ennemis, indépendamment d’un changement d’attitude profond de leur part, l’on dépasse les haines et les rancœurs. Alors naît la paix du cœur.

Je vous exhorte aujourd’hui à prier pour ceux qui vous ont blessé et causé du tort. Dites à Dieu : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent ce qu’ils font. » (Lc 23.34)

(« Mais il y a un Dieu dans les cieux » Carlos Puyol Buil. Ed: Safeliz)