Réveil et Reforme

Blog « Réveil et Réforme » de l'Église Adventiste du Septième Jour de l'île de La Réunion

Jour 7 – Un été sans fin

10 novembre 2017

Attendre le retour de Jésus

La Réforme du 16e siècle est l’un des grands événements de l’histoire humaine. Il s’agit, pour les historiens, d’un clivage marquant entre les temps médiévaux et les temps  modernes. Mais pour les croyants protestants (y compris les adventistes), elle constitue une intervention divine.En matière de doctrine et de pratique, le christianisme devait, en effet, revenir  à la norme de la Parole biblique et rejeter les traditions humaines. C’est là l’essence même de cet énorme bouleversement religieux qui mit un terme à l’« âge des ténèbres ». Comme l’écrit Ellen White, « [le protestantisme] établit que tout enseignement humain doit être subordonné aux oracles de Dieu »(1).

« Viens, oh précieux dernier jour »(2)

À cause de ce principe vital, Martin Luther non seulement fit jaillir la vérité sur la justification des pécheurs, mais il ramena aussi dans le cœur des croyants   la perception du retour de Jésus qui pré- valait dans l’Église chrétienne primitive(3).

Les chrétiens des temps médiévaux croyaient à ce retour. Mais pour eux, cette promesse était une  source  réelle de crainte et de terreur. Comme ils n’avaient pas l’assurance du salut,  nous dit le moine franciscain médiéval Thomas de Celano, le retour de Jésus leur apparaissait comme un « jour de vengeance et d’horreur »« le juge exercerait la justice avec sévérité ». Après une étude consciencieuse des Écritures, Luther déclara avec assurance que l’espérance chrétienne est « une meilleure espérance » (He 7.19), « une espérance vivante » (1 P 1.3), et par conséquent, « la bienheureuse espérance » (Tt 2.13) – ce qui ramena, chez les chrétiens, une attente joyeuse de la fin.

On peut aisément comprendre l’aspiration passionnée de la libération en Christ dont Luther faisait l’expérience dans son parcours de foi. Plus il avançait en âge, plus cette aspiration s’intensifiait. Pour lui, la promesse  du  retour  du Christ était « un sermon aussi doux que joyeux ». Si ce grand jour ne venait pas, le réformateur aurait préféré ne pas naître ! À travers les luttes et les chagrins de sa vie, il n’éprouvait qu’un désir : « Le jour viendra où, selon ta promesse, tu nous rachèteras du mal. Puisse cette heure sublime venir, comme il  se  doit, et mettre à tout jamais un terme à notre misère ! »(4)

« Avoir » et « ne pas avoir encore »

Ici-bas, expliqua Luther, la vie des chrétiens est remplie de tensions. Les croyants « ont » tout, tout en « n’ayant pas encore » ; il « sont » tout, tout en « n’étant pas encore ». Ils ont déjà le salut par la foi, mais ne l’ont pas encore par la vue. Ils sont déjà justes devant Dieu, mais vivent encore dans un monde fragmenté, éloigné de Dieu. En considérant le principe biblique du « déjà » et   du « pas encore », on peut comprendre avec quelle passion Luther attendait le retour du Christ. Pour nous qui avons l’assurance du salut au moyen d’une foi confiante en Dieu, nous soupirons après ce jour – tant et aussi longtemps que nous demeurons en Dieu – animés d’un désir fervent et d’une joie profonde, car en ce jour, la rédemption s’étendra non seulement à nous, mais encore à toute la création. En écho à Luther, nous disons : « Cher Seigneur Dieu, puisse le jour béni de ton saint avenir venir bientôt ! »(5)

Les signes des temps – « Un sermon doux et joyeux »

Alors que  le  réformateur  avançait en âge, son espérance du retour de Jésus s’intensifia parce qu’il se sentait souvent impuissant devant l’humanité et le monde. Il devint clair pour lui que ni les princes, ni le pape ne pouvaient résoudre les problèmes de l’humanité : « Le monde est l’enfant du diable […] on ne peut ni l’aider, ni l’instruire. » Et : « Aucune prédication, aucun cri, aucun avertissement, aucune menace, aucune plaidoirie » ne peut désormais l’aider. Le monde est « la taverne du diable », et les « dix commandements annulés », sa marque… Par conséquent, le monde est et demeure une « caverne de voleurs ».

Ici-bas, expliqua Luther,

la vie des chrétiens est remplie de tensions.

 Ainsi, les chrétiens sont « environnés d’une multitude de démons » ! Seul le retour de Jésus peut mettre un terme à la méchanceté du monde. Le pape et l’empereur mettaient leur espérance dans la politique, et les gens les considéraient comme leurs « sauveurs ». Mais Luther les exhorta à attendre le « vrai Sauveur », celui-là même qui a donné la sûre promesse de son retour.

Pour fortifier son Église dans cette attente, Christ révéla les «  signes  des temps », dont  les  catastrophes  naturelles et les guerres. Le signe le plus clair pour Luther, c’était les  dangers  majeurs  de son époque, lesquels s’appliquent encore aujourd’hui : le déclin de la foi au sein   de la chrétienté, ainsi que le conflit entre l’islam et le christianisme. Avec une vive inquiétude, Luther observa  l’éloigne- ment de l’Église papale de l’Évangile, et la vague de l’expansion islamique qui avait déjà inondé le sud-est de l’Europe, et qui, en 1529, déferla même jusqu’aux portes de  Vienne.  Mais  il  distinguait aussi dans l’ingratitude des disciples de la Réforme un signe distinct du jugement à venir en raison de la lumière qu’ils avaient reçue : « Je veux prophétiser sur l’Allemagne, non en me fiant aux étoiles, mais à la théologie, et je proclame la colère de Dieu contre cette nation. […] Il n’y a qu’à prier pour que Dieu et sa Parole ne soit pas méprisés ! »(6)

Selon Luther, tous les signes se produisent pour l’encouragement des croyants et pour le jugement des incroyants. Ces derniers ont encore « la grâce » de ne pas s’inquiéter de ces signes, tandis que les premiers perçoivent sans doute « la colère de Dieu » réservée aux incroyants, et de laquelle Dieu préserve ses enfants.

Jusqu’où les signes avaient-ils déjà reçu leur accomplissement ? Le réformateur ne voulut pas s’attarder sur cette question. Mais il était convaincu que « la plupart [des signes] s’étaient déjà produits », et que c’était là une raison pour les chrétiens de se réjouir en dépit des catastrophes et de la détresse. Cette joie est caractéristique des véritables interprètes de la Bible, parce que les « contemplateurs d’étoiles et les devins » – Luther pensait probablement aux astrologues et aux ésotériques – ne parlent que de catastrophes. Seuls les chrétiens comprennent « la parole douce et joyeuse, “[leur] délivrance”   (Lc 21.28) ». Par conséquent, le retour du Christ doit être vu à travers les yeux de l’espérance chrétienne, et non à travers ceux de la raison sécularisée.

Selon Luther, les chrétiens doivent « serrer les dents », puis boire la « coupe amère ». Ce n’est qu’après que viendra la « douceur ». C’est pourquoi Christ appelle aujourd’hui sa famille à se lever et à se réjouir. Même si la proclamation de l’Évangile n’est pas bien reçue par la plupart des gens, la « petite foule »  la  comprendra,  travaillera,  et  priera en ayant le retour du Christ bien en  vue, parce que, comme l’a noté Luther, « l’hiver a été suffisamment long. Main- tenant vient un magnifique été – un été sans fin. »(7)

 

1 Ellen G. White, La tragédie des siècles, p. 214.

(2) Martin Luther, Luthers Schriften: Weimar Edition, Briefe, Metzler, Stuttgart, 2002, vol. 9, p. 175.

(3) Paul Althaus, Die Theologie Martin Luthers, 4e éd., Gütersloh: Gütersloher Verlagshaus, 1975, p. 351.

(4) Martin Luther, Luthers Schriften: Weimar Edition, Metzler, Stuttgart, 2005, vol. 34/II, p. 466.

(5) Martin Luther, Luthers Schriften: Weimar Edition, Tischreden, Metzler, Stuttgart, 2000, vol. 5, n° 5777.

(6) Ibid., vol. 3, n° 3711.

(7) Luther, Luthers Schriften, vol. 34/II, p. 481.

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